Confrontés à des responsabilités de plus en plus lourdes et complexes, certains dirigeants doivent s’entourer. Manuelle Charbonneau, Ph.D., est une executive Coach bilingue et biculturelle, consultante experte en développement du leadership et inter-culturaliste avec plus de 25 ans d’expérience. Elle nous donne quelques conseils pour bien choisir un executive coach.
Bonjour Manuelle, qu’est ce qu’un executive coach? Les Américains appellent “Executive coach” un coach professionnel spécialisé dans l’accompagnement des dirigeants, managers, entrepreneurs, cadres supérieurs et autres leaders à haut potentiel. A la différence du coaching de vie, ou Life Coaching, qui est centré sur les dilemmes de la vie personnelle, le coaching de dirigeant se consacre aux compétences et à la performance d’hommes et de femmes dans des postes de haut niveau aux enjeux élevés. Pourquoi un dirigeant ou un manager fait-il appel à un(e) executive coach ? Les clients d’une executive coach sont souvent des leaders qui traversent des périodes de croissance accélérées telles que des prises de fonction avec des responsabilités démultipliées, ou un passage d’un poste d’expert à un poste de leader fonctionnel, ou encore une implantation dans une nouvelle filiale ou une expatriation. Ils ont besoin de développer de nouvelles compétences pour réussir une étape de leur parcours. Le coaching offre un espace de recul régulier et privilégié pour mieux aller de l’avant dans un monde rapide, complexe et sous pression. Une des demandes que je vois beaucoup plus ces temps ci, c’est de travailler avec mes clients sur leur « executive presence », qu’on peut traduire en français par « posture de cadre-dirigeant ». Ce terme de posture représente un mélange de pensée stratégique, de confiance en soi, et de capacité à établir sa voix de leader par une communication plus efficace et une présentation plus sophistiquée. Cela nécessite de passer à un niveau supérieur d’influence et d’intelligence émotionnelle, systémique et politique, tout en capitalisant sur ses points forts bien sûr ! Nos leaders sont des hommes et des femmes courageux à qui on demande énormément. Une executive coach établit des priorités avec chaque client et les aide à rester centrés sur les éléments clés de leur réussite. Quels conseils avez vous pour ceux et celles qui souhaitent travailler avec un executive coach? Tout d’abord, informez vous : lisez sur Internet ou parlez à des collègues ayant eux même travaillé avec un executive coach, si vous en connaissez. Parlez avec votre supérieur hiérarchique pour engager son soutien. Si vous faites partie d’une grande entreprise ou d’un grand groupe, contactez votre département des Ressources Humaines. Les sociétés françaises et américaines ont souvent mis en place des programmes de développement du Leadership qui comprennent des formations internes et externes ainsi que des programmes de coaching. Dans ces sociétés, les RH ont établi des critères sur la sélection des dirigeants et managers pouvant bénéficier du coaching et sur la prise en charge. Que vous soyez dans une grande entreprise, une PME ou entrepreneur, réfléchissez à ce que vous voulez accomplir. Interviewez deux personnes qui vous ont été recommandées, voyez comment vous vous sentez avec eux ou elles, et posez leur des questions sur leurs méthodes de travail. Y a t-il certaines techniques utilisées en executive coaching que nos lecteurs peuvent appliquer dans leur vie professionnelle de tous les jours ? Absolument ! Une des choses les plus simples et pourtant les plus difficiles à faire, pour les leaders comme pour nous tous, c’est de prendre conscience de la manière dont nous sommes perçus par les autres en leur demandant du feedback. Dans un engagement de coaching professionnel, une exécutive coach se servira de techniques approfondies pour recueillir du feedback anonyme sur le coaché, comme par exemple des entretiens à 360 degrés ou des questionnaires confidentiels avec des parties prenantes. Mais dans bien des cas, nos lecteurs peuvent obtenir d’excellents résultats dans des situations simples en demandant du feedback autour d’eux sur des points précis, comme par exemple à leur équipe à la fin d’une réunion: « Merci de me dire une chose qui a particulièrement bien marché avec la réunion que j’ai menée aujourd’hui, et une chose que je pourrais mieux faire la prochaine fois». Ecoutez bien les suggestions sans être sur la défensive, et dites juste « Merci » à chaque interlocuteur. Je sais, ça n’est pas toujours facile…Si vous réfléchissez aux suggestions que vous avez reçues et en mettez juste deux en place à votre prochaine réunion, vous ajouterez sans effort surhumain une valeur concrète qui va être remarquée de tous. C’est de plus un très bon exemple pour vos collaborateurs, qui ont bien sûr eux aussi une ou deux choses à améliorer comme nous tous. C’est gratuit et cela peut se faire en 5 minutes. Mais il faut du suivi, car le feedback n’est que la première étape ! Ce qui compte pour aboutir à des résultats, c’est ce que l’on met en place d’une manière pratique et dans la durée. Est-ce plus difficile pour les Français de recevoir du feedback ? Cela dépend. Les techniques de feedback peuvent nous paraître un peu concrètes et plates à nous les Français, avec nos brillantes capacités d’analyse et notre esprit critique, mais beaucoup de Français apprécient justement ce côté pratique et direct. Le feedback est aussi un concept différent pour ceux d’entre nous qui ont été scolarisés en France, où nous avons souvent été habitués à une critique hiérarchique perfectionniste plutôt qu’à un retour bienveillant destiné à nous faire aller de l’avant. Cela dit, Français ou Américains, nous avons tous un peu peur de savoir comment nous sommes perçus par les autres, c’est humain. Ce que je dis à mes clients c’est que de toute façon, si vos réunions sont trop longues, ou si vous ne déléguez pas assez, ou si votre plan stratégique n’est pas clair, vos collaborateurs le pensent déjà. Ils en parlent probablement entre eux en se demandant comment vous approcher d’une manière diplomatique. Le feedback vous permet de concentrer vos efforts sur quelques éléments clés qui vont produire des résultats. C’est beaucoup ! Ceux d’entre nous qui ont eu l’occasion de passer d’un PC à un Mac, ou vice versa, ont déjà vécu sans avoir à voyager une experience inter-culturelle :
Il y a quelques années, et à ma grande surprise, cette transition d’un système d’ordinateur à l’autre m’avait pris plus de trois mois. Trois mois d’alternance entre des hauts (« Ah, aujourd’hui, j’ai été capable d’intégrer tous ces graphiques en un temps record, ce nouveau système est génial ! ») et des bas (« Je ne comprends pas comment ce nouveau système pense, ça n’est pas logique ces fichiers ! ») avant d’arriver à vraiment fonctionner dans les deux systèmes. Pour les Français arrivés relativement récemment aux États-Unis, comme pour tout expatrié à court ou long terme, la question se pose toujours : dans quelle mesure souhaitons-nous, devons-nous, ou voulons-nous, nous adapter et interagir avec cet « autre système », avec la culture locale qui nous accueille ? Dans quelle mesure souhaitons nous préserver, ou prendre le risque de remettre en question, certains aspects de notre identité Française si nous nous adaptons aux pratiques et aux valeurs Américaines ? Les chercheurs qui étudient ces questions inter-culturelles ont identifié certaines étapes par lesquelles beaucoup d’entre nous passerons, ou sommes déjà passés, lors de ces explorations :
Comme tous les séjours prolongés dans une culture étrangère, vivre aux Etats-Unis nous donne l’opportunité de mieux comprendre qui nous sommes et de faire évoluer notre vision de ce nous voulons devenir. La gestion soft et implacable du temps aux États-Unis
Manuelle Charbonneau, Ph.D. Los Angeles, 10h58 un matin. « Great, that was very interesting » me dit mon interlocuteur en se levant de son bureau. En code Américain, cela veut dire que notre réunion est finie et que j’ai deux minutes pour le remercier et conclure. Il a probablement une autre réunion à 11h, et j’aurais du commencer à résumer et à parler de nos « next steps » autour de 10h50. Ce scenario est typique d’une interaction de business entre Français et Américains. Les Français ont une notion beaucoup plus flexible du temps. Sous des apparences souvent très cool et amicales, les Américains ont une main de fer sur le temps. Vous joignez la conférence call à 10h04 au lieu de 10h ? Vous êtes en retard. Et même si personne ne vous le dira, ce retard sera interprété d’une manière négative aux États-Unis : manque de respect pour les participants, manque de professionnalisme, manque d’organisation. Vous avez une présentation ou un pitch the 20 minutes ? Si vous dépassez de 2 minutes, on pensera « n’a pas pris suffisamment le temps de pratiquer ». Si vous êtes à une soirée de networking et que vous souhaitez avoir une discussion approfondie avec un participant avec qui vous avez déjà échangé depuis 5 à 10 minutes, il est temps de faire la transition : « Thank you so much, it was great meeting you, would it be okay if I called you to schedule a time to get together ? » Pourquoi cette cadence? Par respect du temps de l’autre, car cette personne a peut-être encore deux personnes à voir absolument dans les 20 minutes qui restent de cet évènement de networking qui finira, lui aussi, à l’heure. Le fait que tout le monde soit souvent très gentil ne veut pas dire qu’il n’ont pas quelque chose d’autre à faire dans 10 minutes ! La gestion du temps est une discipline invisible et implacable aux Etats-Unis. Prendre conscience de l’invisible est toujours le premier pas. |
AuteurManuelle Charbonneau, Ph.D. ArchivesCategories |